LE BOUDDHA ET LES ARBRES
Connaissance & Partage
Tout au long des récits de la vie du Bouddha certains arbres jouent un rôle essentiel. Dans le Theravada ils ne sont donc pas vus strictement comme des éléments naturels mais comme des signes rappelant les étapes du destin de « l’Eveillé ». Mais c’est aussi la trace de l’héritage de la très ancienne religiosité populaire qui avait cours à l’époque de sa vie. Comme en Occident, les arbres étaient censés abriter des divinités auxquelles les villageois avaient coutume d’offrir des offrandes
Enceinte des œuvres d’un éléphant blanc intervenant dans un songe, la princesse MAYA (“Illusion” en sanskrit) se sentant prête à accoucher, se met en route vers la maison de ses parents comme le veut la coutume. Ressentant les premières douleurs à la vue d’un ashoka en fleurs, elle ne va pas plus loin. Le Bouddha nait sous l’arbre, marchant aussitôt, des fleurs de lotus s’ouvrant à chacun de ses pas. Dans les représentations les plus courantes, Maya tient une branche de l’arbre de la main droite et touche le tronc du pied gauche à la façon des yakshas (nymphes des arbres). Cette posture est interprétée comme la représentation du rituel par lequel une jeune fille nubile peut faire fleurir un arbre en le frappant du pied (porter la fleur = faire naitre).
L’ashoka, Saraca indica, est un arbre tropical, courant en Inde du Nord, de forme pyramidale, à feuillage dense, pouvant atteindre une hauteur d'environ 10 mètres. Ses feuilles sont pennées avec des folioles d'un vert brillant à bords ondulés, longues et étroites d'environ 20 cm de long. Les fleurs orange, très odorantes, possèdent de longues étamines rouge foncé. Elles sont groupées en grappes arrondies (floraison d’avril à mai).
LE TEMPS DE LA MÉDITATION SOUS LES JAMBUS
Renonçant à l’ascétisme extrême, le Bouddha se met en méditation sous un jambu (jambousier). Une villageoise, Sujata, apportant un bol de nourriture en remerciement d’un vœu fait à la divinité de l’arbre, le prend pour celle-ci. Le Bouddha la détrompe et accepte son repas. La méditation va l’emporter sur le jeûne, le méditant se nourrissant dès lors d’offrandes.
Le jambu, jamrosat ou Syzygium jambos, est un arbre de la famille des Myrtacées, originaire de la région indo-malaise, qui affectionne les climats chauds et humides ou, lorsque le climat est un peu plus sec, qui se cantonne dans les ravins ombragés près des cours d'eau. L'arbre peut atteindre une quinzaine de mètres de hauteur. Les feuilles, opposées, sont allongées et pointues. Les fleurs, disposées en bouquets sommitaux, avec de nombreuses et spectaculaires étamines de couleur crème. Le fruit est une baie de couleur jaune de 2 à 4 cm de diamètre, dont les tissus internes se distendent formant ainsi un fruit « creux » contenant souvent une graine unique devenue libre comme dans un grelot. Ce fruit est comestible. La chair a la consistance d'une pomme croquante et le parfum de la rose, d'où les noms qui sont attribués tant à l'arbre qu'à son fruit (en français : jambrosade). Ce dernier peut être consommé cru ou servir à des préparations de liqueurs parfumées.
NB = En vieux sanskrit, l'Inde actuelle était appelée par les Indiens eux-mêmes JAMBUDVIPA, qui signifie "pays des jamrosats" (jambu = jamrosat ; dvipa = pays)
L’ILLUMINATION SOUS UN PIPAL
Après avoir longtemps médité sous des jambus, le Bouddha atteint l’illumination sous un pipal, à BODHGAYA (actuel état du Bihar en Inde). Cet arbre, appelé BODHIMANDA ou Bo, occupe donc une place particulièrement importante dans la mythologie bouddhiste. Ses feuilles sont devenues un motif iconographique ainsi qu’un porte-bonheur. Il peut être considéré comme représentant le Bouddha luimême ou son enseignement.
En 288 av. J.-C., une branche de l’arbre s’étant détachée d’elle-même, conformément à une prédiction du Bouddha, elle fut apportée à Anuradhapura (Sri Lanka) par la propre fille d’Ashoka qui instaure le bouddhisme religion d’état. Le roi de Sri Lanka, Devanampiya Tissa, planta la bouture en grande cérémonie. Ses successeurs prirent l’habitude de répéter ce rituel tous les douze ans.
Cet arbre, dont on prétend localement qu’il est le plus ancien angiosperme du monde, est protégé par une grille dorée. Des moines et laïcs consacrés en ont la charge. Les fidèles viennent prier devant lui. Ils font brûler des lampes d’huile de coco, présentent diverses offrandes dont des pièces de monnaie lavées dans du safran et effectuent une triple circumambulation de l’arbre.
A BODHGAYA l’arbre originel fut détruit au moins trois fois, dont une, selon la légende, sur ordre de Tissarakha, épouse d’Ashoka, jalouse de l'importance que le roi accordait à l'arbre. Il aurait été replanté à chaque fois à partir d’un clône sri-lankais. A l’époque d’Ashoka, il fut flanqué d’un temple, le Bodhimanda Vihara, devenu le temple de la Mahabodhi. Les pèlerins prirent vite l’habitude d’emporter avec eux des feuilles et des graines des arbres des lieux sacrés. De nombreux « enfants » de ces arbres existent dans le monde. Un arbre de la Bodhi, représentant l’enseignement du Bouddha, est planté près de tout nouveau monastère.
Le pipal (figuier des pagodes, ou figuier des banians dit aussi arbre de la Bodhi), Ficus religiosa, est un arbre appartenant au genre Ficus, de la famille des Moracées. C’est un arbre majestueux, qui peut atteindre 30 mètres, avec une très large couronne portée par des branches majestueuses en ombrelles. Les feuilles sont pendantes avec un appendice foliaire très allongé et tombent en mars-avril pour un renouvellement de la frondaison. Une floraison rouge apparait en février, suivie de fruits.
LE MIRACLE SOUS LE MANGUIER
Le Bouddha n’est pas favorable à la démonstration de pouvoirs surnaturels, mais il se résout néanmoins à exécuter le « miracle de la dualité » sous un manguier pour convaincre le roi Pasenadi de la valeur du bouddhisme. Ses adversaires font couper l’arbre, mais il le reconstitue immédiatement à partir du noyau d’une mangue offerte par le palais.
Ses feuilles alternes, entières, sont oblongue et pointue, pouvant mesurer de 15 à 35 cm de long sur 6 à 16 cm de large. Lorsqu'on les froisse, elles exhalent une odeur de térébenthine. Leur couleur est d'un rose orangé au début de leur croissance puis passe par une teinte rouge foncé brillant avant de devenir vert foncé à maturité, Les fleurs, blanc rougeâtre, sont petites et regroupées en grappes terminales de 10 à 40 cm de long. Vers le milieu du printemps, après la fin de la floraison, il faut de trois à quatre mois pour que les fruits arrivent à maturité. Ce fruit charnu est une drupe de forme oblongue attachée à un long pédoncule, de taille variable selon les variétés, de 10 à 25 cm de long sur 7 à 12 cm de diamètre, de poids variant de 500 g à 2,5 kg. La peau, assez résistante, est à maturité de couleur jaune plus ou moins tachetée de vert et de rouge (sur la face exposée au soleil). Le noyau, plutôt gros contient une graine unique de grande taille (4 à 7 cm de et 1 cm d'épaisseur). Il est recouvert de fibres, plus ou moins développées dans la chair, selon les variétés.
LA MORT SOUS LES FLEURS DU SAL
Le Bouddha est en train de méditer dans un bois de sals près de Kushinagar (INDE –état de l’Uttar Pradesh) lorsqu’il meurt. Immédiatement son corps se recouvre de leurs fleurs. Son corps bien qu’incinéré laisse de nombreuses reliques incorporées dans des stupas qui deviennent des centres de pèlerinages réputés. Le ROCHER D’OR de la pagode de Kyaiktiyo (MYANMAR) conserverait sa stabilité grâce à un cheveu du Bouddha …
Le sal, ou sala, Shorea robusta est un grand arbre de l'Asie du Sud. En Inde, sa localisation s'étend entre Assam, Bengale et Jharkhand à l'Ouest jusqu'à l'Est de Yamuna. Dans ces régions, il constitue l'arbre le plus courant dans les forêts. Il a une croissance plutôt lente, mais peut atteindre entre 30 et 35 mètres. Son bois, résineux et durable, en fait un des bois de charpente ou de construction, les plus utilisés en Inde. Son grain plutôt grossier mais d’une certaine dureté, a une couleur claire fonçant lorsqu'elle est exposée à la lumière. Dans les zones les plus humides, il garde ses feuilles tout au long de l'année ; dans les zones sèches, il en perd la plupart entre les mois de février et avril, pour reconstituer son feuillage en avril - mai. La résine de sal est utilisée comme encens dans des cérémonies hindoues. On utilise ses graines et ses fruits comme source d'huile (lampes) et de graisse végétale.
Le Bouddha allongé donne lieu à une statuaire le plus souvent gigantesque, jusqu’à plusieurs dizaines de mètres. Mentionné dans d'anciens textes, il y aurait, enseveli sous les alluvion de la vallée de Bamiyan (Afghanistan) un Bouddha couché de 300 m de long. Mais s’agit-il du corps du Bouddha mort ou du Bouddha planant dans le Nirvana ? Pour le savoir, il faut observer les pieds. S’ils sont décalés et dans 2 plans différents, c’est le corps du Bouddha mort. S’ils sont dans le même plan et parfaitement superposés, c’est le Bouddha ayant atteint le Nirvana…
Pour conclure, ne manquez pas de faire un petit tour chez Brassens : Auprès de mon arbre je vivais heureux …
Jean BARROT